La gratuité totale des transports en commun séduit de plus en plus de villes françaises, pourtant, la Cour des comptes émet des réserves quant à cette politique. Bien que cette approche puisse sembler attrayante pour renforcer l’utilisation des transports collectifs, l’institution met en lumière les risques financiers qu’elle pourrait engendrer, fragilisant ainsi les réseaux déjà fortement subventionnés. Cet article explore les enjeux et conséquences d’une telle décision sur l’équilibre financier des collectivités locales et la qualité des services de transport.
Les conséquences financières de la gratuité
La mise en place d’une gratuité totale des transports en commun pourrait avoir des conséquences financières désastreuses pour les collectivités. En supprimant les recettes tarifaires, bien que déjà limitées, les collectivités doivent compenser cette perte par une augmentation de la fiscalité locale ou par des contributions des entreprises, comme le versement mobilité. Les magistrats de la Cour rappellent que les transports publics sont financés à plus de 70% par la collectivité, ce qui souligne l’importance de maintenir une source de revenus pour garantir la pérennité des services.
Cette mesure, si elle est adoptée sans réflexion approfondie, pourrait conduire à une augmentation des coûts pour les contribuables, mettant ainsi en péril l’équilibre financier des réseaux de transport. La dépendance accrue aux financements publics pourrait également limiter les capacités d’investissement des collectivités, qui seraient contraintes de prioriser d’autres domaines sociaux.
L’impact limité sur l’usage de la voiture
Un autre point soulevé par la Cour des comptes concerne l’impact de la gratuité sur l’usage de la voiture individuelle. Bien que la gratuité ait été instaurée dans certaines villes comme Dunkerque ou Montpellier pour encourager le report modal, il apparaît que cette mesure n’a pas eu l’effet escompté sur la réduction de la circulation automobile. En effet, l’augmentation de la fréquentation des transports en commun provient principalement d’anciens piétons et cyclistes plutôt que d’automobilistes.
La gratuité, loin d’être un levier efficace pour diminuer le nombre de véhicules sur les routes, pourrait alourdir les budgets publics sans atteindre les bénéfices environnementaux anticipés. Les magistrats s’inquiètent de ce que cette stratégie puisse mener à des effets limités sur la congestion routière et les émissions de dioxyde de carbone (CO₂), éloignant ainsi les autorités de leurs objectifs écologiques.
Préférer des solutions ciblées et durables
Pour la Cour des comptes, l’approche de la gratuité universelle n’est pas la solution la plus judicieuse. Au lieu de cela, les magistrats préconisent de privilégier des tarifications sociales qui soient plus ciblées. Cela pourrait inclure des réductions pour les jeunes, les étudiants et les ménages modestes, tout en maintenant des recettes pour soutenir le fonctionnement des réseaux de transport.
En parallèle, il est crucial d’investir dans l’amélioration de l’offre de transport collectif, en modernisant les infrastructures et en renforçant les fréquences. Une telle stratégie permettrait de répondre efficacement à la demande croissante tout en respectant les objectifs de transition écologique.
Un débat autour de la pérennité des services de transport
Le débat sur la gratuité des transports en commun survient à un moment où les besoins de financement des mobilités urbaines explosent dans les grandes agglomérations. Si l’État et les collectivités locales souhaitent répondre aux enjeux de réduction des émissions liées aux transports, il est nécessaire d’adopter une approche équilibrée. La gratuité peut séduire sur le plan politique, mais sans un soutien financier durable, cette option risque de devenir contre-productive.
Tous ces éléments montrent que la gratuité totale des transports en commun, bien qu’une idée séduisante, n’est pas nécessairement la solution miracle. Les collectivités doivent envisager d’autres moyens de financement et de développement des transports publics pour garantir à la fois l’accès pour les usagers et la qualité des services proposés.